Le Professeur Attar est intervenu en fin de semaine écoulée, lors d'une
conférence sur les cours pratiques destinés aux étudiants de deuxième année de
Magister en sociologie de la santé, ayant eu lieu au siège du GRAS que dirige
Mohamed Mebtoul. D'entrée de jeu, l'intervenant, qui devait revenir sur son
expérience de gestionnaire du CHU Oran, lancera «j'ai été nommé à ce poste le 8
mars 2005 sans que la tutelle me précise clairement ni mes prérogatives ni les
objectifs à atteindre». D'ailleurs, lors des débats, le conférencier
reconnaîtra qu'il a été «remercié» de la même manière, sans que la tutelle lui
demande ni compte ni bilan. L'on apprendra que depuis 1966, 30 directeurs se sont
succédé à la tête de cet établissement hospitalier. On citera l'exemple de
Medelci, exerçant actuellement au Canada, qui a essayé d'imposer un plan
d'action et que son règne n'a pas dépassé six mois. Il citera le cas similaire
de Sanhadji se trouvant actuellement à Lyon. En moyenne, rappellera le Pr
Attar, un directeur du CHU Oran ne reste pas en poste plus de six mois.
Revenons sur son expérience, il dira que «dès les premiers jours j'ai découvert
la tonne de problèmes que je devais affronter». Et d'expliquer «au lieu
d'assumer le rôle de manager, on voulait me ramener à celui de justicier».
Raisonnant à l'aide de comparaison, l'intervenant soulignera qu'en 1970, le CHU
Oran disposait de 2.914 lits alors qu'en 2007, ce chiffre s'est réduit à 1.800
lits. Plus grave, notera t-il, en 1970, l'hôpital fonctionnait avec moins de
personnel qu'actuellement. Soulevant la question de la masse salariale, il
précisera qu'elle dépasse les 10 milliards de centimes par mois.
Illustrant ses propos, il parlera des «57 chauffeurs pour six ou sept
engins dont des ambulances». Il se rappellera qu'il avait réduit la
consommation du carburant de 110.000 litres durant l'année 2005-2006 à 24.000
litres l'année d'après. Il signalera le cas de la redevance du téléphone qui se
chiffrait en milliards de centimes. Sur ce point précis, Attar affirmera que 18
ans durant, il n'existait pas de lignes téléphoniques internes au CHU Oran. Il
lancera «sur les 57 services que compte le CHU Oran, on peut aisément fermer le
tiers sans porter préjudice aux usagers de cet établissement». Il donnera
l'exemple de la maternité qui, à elle seule, compte 350 lits. «Ce qui
représente le nombre de lits d'un hôpital de daïra». Le professeur Attar
reconnaîtra qu'à chaque fois que «j'essayais d'engager une réforme, ou une
action d'assainissement, les coteries, les clans et les groupes d'intérêts se
coalisaient pour m'en empêcher». Empruntant un raccourci, il ajoutera que la
direction était perçue comme «le fournisseur attitré des produits
pharmaceutiques et autres». Mais malgré ce tableau peu reluisant de
l'institution hospitalière, Attar affirme qu'elle reste incontournable dans le
système de santé. Autrement dit, il considère le CHU Oran comme le meilleur
établissement offrant des soins à la population. Il reconnaîtra que des femmes
et des hommes se battent tous les jours pour offrir une prestation humaine aux
usagers de cet établissement. «Mais c'est l'usure qui risque d'avoir raison de
leur volonté et de leur engagement», avertit-il. En conclusion, il insistera
que «le problème du CHU Oran n'est pas un problème d'argent ou de compétence»,
mais une question de management. Voilà ce qu'il en tire de son expérience
s'étalant de mars 2005 à juin 2006. «Avec les moyens humains matériels et
financiers dont il dispose, le CHU Oran peut offrir un service correct à ses
usagers», lance-t-il à l'adresse de son auditoire en conclusion. Les autres
intervenants, sociologues dans leur majorité et quelques praticiens de la
santé, ne se sont pas empêchés de faire le parallèle avec les autres
institutions nationales telle que l'université, l'administration... L'hôpital
n'est pas un corps étranger à la société dans lequel il se trouve, note l'un
d'entre eux. Le professeur Mebtoul, spécialiste en anthropologie de la santé,
reviendra sur sa thèse de l'apport de la famille dans l'acte de médication
prodigué par l'institution hospitalière. Le conférencier semble partager son
point de vue.