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Les échanges restent faibles alors que les IDE baissent: Le Maghreb continue de se rater vingt ans après

par M. Saâdoune

Le 20ème anniversaire de l'Union du Maghreb est particulièrement morose. Au niveau politique, les choses n'avancent pas et très logiquement l'économie ne suit pas.

Des experts maghrébins réunis à Tunis n'ont pu que constater, une fois de plus, que le commerce intermaghrébin est inférieur à 3% des échanges des cinq pays. Comme il n'y a pas de Maghreb économique à évaluer, les experts se réunissent régulièrement pour essayer de chiffrer le coût du « non-Maghreb ». Les extrapolations les moins pessimistes estiment que le non-Maghreb coûte 2 points de croissance annuelle pour les économies du Maghreb. Le directeur du FMI, Dominique Strauss-Kahn, a eu l'idée simple en novembre dernier de demander aux pays du Maghreb de se mettre au même niveau des relations qu'ils entretiennent avec l'Union européenne.

Apparemment, ce discours élémentaire est intraduisible en maghrébin. Seuls les experts, qui ne font pas de « politique », notent régulièrement la complémentarité entre les économies de la région et son potentiel dans le cadre d'un marché de 100 millions de personnes. Les pays maghrébins ont plutôt tendance à afficher le bilan des IDE (investissements directs étrangers) plutôt que de songer à créer les synergies élémentaires entre leurs économies. Or, ces investissements directs étrangers, selon des chiffres du réseau Anima, rendus publics à l'occasion de la Conférence MedInvest, ouverte hier à Beyrouth, sont en ralentissement dans les pays du Maghreb, notamment dans les secteurs créateurs d'emplois. L'effet de la crise économique mondiale se fait sentir. La présentation de ces chiffres se veut volontiers optimiste en indiquant que les pays méditerranéens « résistent à la crise malgré une baisse des IDE entrants ».

En réalité, la difficulté à appréhender l'ampleur de la crise rend aléatoires les projections sur l'avenir des IDE dans la région. Les difficultés financières des entreprises internationales les conduisent à des révisions drastiques des projets d'investissements. Avec des IDE qui ont chuté de 22% en 2008 et qui pourraient l'être davantage en 2009, il ne faut pas s'attendre à des chiffres importants à exhiber dans les bilans de fin d'année. L'observatoire Anima des IDE en Méditerranée indique que la région Méditerranée a attiré 770 nouveaux projets en 2008, soit moins de 7% par rapport à 2007. L'attractivité de la région où les prévisions de croissance sont de l'ordre de 3,9%, selon la Banque mondiale, devrait résister au ralentissement de l'activité économique mondiale. Encore faut-il nuancer. Les IDE sont partis principalement vers la Turquie et Israël qui attirent 60% du stock des IDE en 2008, le Maghreb n'accueillant que 20%.

Les annonces d'investissements enregistrées par l'observatoire pour les pays méditerranéens ont été de 40,6 milliards d'euros en 2008 contre 61 milliards d'euros d'IDE reçus en 2007 et 68 milliards d'euros en 2006. On en a eu les annonces avec le retrait de Nissan du projet d'usine automobile de Tanger avec Renault, l'annulation de projets d'Eemar... A l'évidence, même les capitaux arabes du Golfe sont devenus plus prudents en raison de la crise et modèrent leurs intentions d'investissements. Les prévisions en matière d'IDE risquent bien d'être détrompées par une crise à l'ampleur inédite. L'optimisme relatif des experts du réseau Anima devrait être relativisé davantage. Les IDE risquent d'être moins importants durant les années à venir alors que le gisement maghrébin reste inexploité.