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Elle s'appelle Madame El Moussaoui Fatima
née Ghali, elle habite actuellement le logement mitoyen au centre de santé de
proximité sur le boulevard Med Khemisti (lycée En Nadjah). Elle avait 23 ans lorsqu'elle débuta en 1963 ses
cours de parachutisme à l'aéroclub de Sidi Bel Abbès.
Ce dernier était probablement le seul centre d'aviation en Algérie à n'avoir pas
chômé après l'indépendance puisqu'un grand nombre de moniteurs et instructeurs
français avaient décidé de rester en Algérie après 1962 et ils ont continué à
dispenser leur noble tâche aux jeunes générations de l'Algérie indépendante.
Pour Madame Ghali Fatima, aujourd'hui le 8 mars 2016, elle a bouclé ses 76 ans et l'aéroclub de Sidi Bel Abbès a décidé de ne pas l'oublier en cette journée de fête internationale par excellence dédiée à la femme, une journée que gardera probablement en mémoire notre infirmière héroïne d'une part, combattante, d'autre part, et première femme parachutiste de l'Algérie indépendante enfin. Elle n'a jamais cru que ce jour viendra, elle a seulement souhaité trouver quelqu'un à qui lui raconter son histoire, toute son histoire, un récit émouvant parfois qui débute en septembre 1959, date à laquelle elle réussit son concours d'admission à l'école de santé du département d'Oran, puis son passage à la maison de torture, sise sur le boulevard Zabana (ex-bd Maréchal Joffre - SBA) après qu'elle fut accusée de fournir des médicaments et d'aider les « fellagas », vint ensuite son passage à l'aéroclub de SBA où elle fut félicitée par le président Ben Bella après un saut en parachute à Alger d'une hauteur de 3.000 mètres et enfin ses nombreuses navettes, toute seule, à bord de son propre véhicule, que ce soit de Bedeau à Tlemcen en 1962 ou de SBA vers Alger après 1965. Dans les deux cas, elle transportait des enfants malades qu'il fallait évacuer à Tlemcen pour les premiers et vers l'hôpital Maillot (Alger). L'aéroclub a tenu à honorer cette dame pour son triple engagement à la cause algérienne et au pays, un engagement qui la différencie de beaucoup d'autres femmes. Infirmière de renom tout d'abord de la région qui ne cesse de prodiguer à ce jour, aide et assistance aux malades sans le sous. Elle a été emprisonnée, mise dans une «cave» en 1961 par les «forces locales» et allait subir d'atroces tortures pour son assistance et fourniture de médicaments aux combattants de l'ALN. D'ailleurs, elle raconte avoir été sollicitée au cours de l'année 1961, en urgence dans une forêt de Bedeau où elle devait amputer, des deux jambes, un moudjahid nommé Si Noureddine, pris au piège lui et ses compagnons d'armes dans une embuscade tendue par l'armée coloniale, sous une température frisant le zéro degré. Et dans ce contexte, tout en nous signalant que le moudjahid Si Noureddine vit à ce jour à Télagh, elle exhibe un certificat de reconnaissance signé par le commandant de secteur Si Fodil, en 1963, pour son soutien inconditionnel à ses frères d'armes, mais ce document, elle ne l'a jamais utilisé même pas pour se faire délivrer une fiche communale comme tout autre moudjahid. Dès l'indépendance, elle était parmi les premières femmes infirmières à s'occuper des enfants et s'est sentie forcée de passer son permis de conduire qu'elle obtint avec succès et devint ainsi l'une des premières femmes à conduire un véhicule à Sidi Bel Abbès. Mais auparavant, elle dut retourner à sa ville natale Ras El Ma (ex-Bedeau) dès 1962 pour s'y donner à plein temps dans une maison mise à sa disposition par un certain Lamara Zouaoui qu'elle a transformée en hôpital de fortune pour accueillir les malades de la région. Cependant, moins d'une année plus tard, en 1963, elle se rappelle le sous-préfet de Télagh, accompagné de ce qu'elle pense M. Djamel Ould Abbas, médecin à l'époque à Télagh, qui lui intimèrent l'ordre de rejoindre l'hôpital de Sidi Bel Abbès en raison du nombre élevé d'enfants malades. Elle n'oublie pas que lors de son séjour à Ras El Ma, elle fut d'une aide capitale pour la formation d'une dizaine d'infirmières dans la région et se rappelle même plusieurs d'entre-elles en activité aujourd'hui. A la même époque, l'aéroclub de Sidi Bel Abbès, qui fut l'un des premiers aérodromes d'Afrique du Nord, grouillait de monde, le jeune président Daho Bel Hadri, un infirmier de formation, a été l'un des plus dynamiques et actifs présidents du club et en compagnie des instructeurs français, il réussit à rassembler autour de lui des jeunes désireux faire carrière dans l'aviation. Dans sa campagne de sensibilisation à toutes les catégories de jeunes susceptibles de voler et de faire carrière dans l'une des disciplines enseignées, il trouva une ouïe fine de la jeune infirmière Ghali Fatima, alors exerçant au même titre que lui à l'hôpital de Sidi Bel Abbès. Cependant, elle avait une tout autre intention et objectif dans sa tête en acceptant la proposition du président de devenir une parachutiste. Elle croyait tout simplement que cette occasion de largage par parachute allait lui permettre de secourir une population isolée ou des djounoud blessés en cas de guerre dans les montages. Une intention plus que sincère lorsque l'on écoute son récit émouvant sur sa jeunesse dévouée complètement à la patrie. Parallèlement et tout en continuant son entraînement à l'aéroclub, elle réussit plusieurs sauts de parachute qui ont été effectués au-dessus de ce qui était appelé à l'époque le champ d'oliviers, actuellement l'usine ENIE; elle réussit à faire de nombreux autres sauts à Sidi Bel Abbès, une soixante, qui lui permirent d'être douée et fut invitée pour des sauts d'exhibition en parachute à Alger. Ce jour-là à Alger, elles étaient seulement deux filles, elle et sa copine de Saïda, le moniteur, embarqué sur l'hélicoptère avec elles, leur signifia clairement qu'il y avait un vent fort de quelques dizaines de nœuds rendant tout saut de parachute dangereux ou impossible, elle insista « parce qu'il y a le président qui nous attend en bas », dit-elle à son instructeur. Et ce fut chose faite, elle sauta dans le vide au-dessus d'Alger et fut emportée plus loin qu'elle ne l'espérait en raison du fort vent comme annoncé mais elle fut acclamée en héroïne, le président Ben Bella lui-même s'approcha d'elle et la félicita chaudement. «Il m'embrassa», dit-elle en ajoutant: «C'était là mon grand bonheur pour ce saut de parachute !» C'est ainsi qu'elle fut la première femme parachutiste d'Algérie. De retour à Sidi Bel-Abbès, elle continua son combat contre les maladies des enfants, et avait proposé à son chef de centre d'aller à la rencontre de la population pour éradiquer ces maladies infectieuses telles la diphtérie, la rougeole, la poliomyélite, le tétanos, etc. Hier, le 8 mars 2016, elle faisait partie de quelques femmes qui ont été honorées par les autorités locales de la wilaya de Sidi Bel Abbès à la maison de la culture Kateb-Yacine de SBA et nous (membres du comité de l'aéroclub) avons tenu à l'honorer par cette contribution pour qu'elle puisse demeurer dans la mémoire collective et servir d'exemple pour les générations futures. |
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