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Les transformateurs de la filière blé dur
souffrent, en Algérie, de fournitures de mauvaise qualité. Le rendement moyen
des parcelles demeure faible. Il y a sept ans, c'était exactement le tableau de
la production de la tomate industrielle. Depuis, rendement et qualité ont
décollé. A l'initiative professionnelle d'un transformateur, CAB, filiale du
groupe Benamor qui veut aujourd'hui «refaire le coup», collectivement, avec les
céréaliers.
Les professionnels de la filière du blé dur ont rendez-vous le 15 et le 16 décembre prochains à Annaba, dans des journées techniques, pour «arrêter une démarche commune» répondant «aux nouveaux enjeux tant économiques qu'alimentaires». Pour Laïd Benamor, manager général du groupe agro-alimentaire du même nom, «c'est une fenêtre d'opportunité qu'il nous faut absolument ne pas rater. Les producteurs de blé bénéficient d'une subvention de 4500 dinars à la tonne, la plus élevée au monde. C'est une mesure que j'ai défendue et qui se justifiait lorsque les cours mondiaux étaient, il y a trois ans, de 750 dollars la tonne. Ce n'est plus le cas et il faut donc s'attendre à ce que ce généreux soutien de l'Etat se réduise voire disparaisse». Il s'agit donc d'agir pendant que les producteurs sont sécurisés dans leurs revenus pour garantir l'avenir de la filière. Des producteurs sans retour d'information La réalité est qu'à concurrence ouverte, le blé dur algérien est menacé. Qualité problématique pour les transformateurs, rendements plus faibles. Les parcelles sont «peut attentives» aux exigences de la transformation agroalimentaire qui est pénalisée dans ses ambitions de marché (semoule, pâtes alimentaires), en Algérie et à l'extérieur. Conséquence, la tentation d'utiliser le blé dur importé, de bien meilleure qualité, et à nouveau compétitif en prix, est momentanément contenue par le système de subvention. Le blé australien arrive après 35 jours de mer à 250 dollars la tonne en Algérie. Le réveil risque d'être brutal pour tous les acteurs de la filière dans quatre ou cinq ans. Les producteurs du blé dur ressentent déjà monter les pressions pour faire glisser le modèle alimentaire algérien en dehors de ce blé dur qui revient si cher à l'Etat. Laïd Benamor estime lui qu'un label algérien du blé dur est tout à fait à la portée de la filière. D'autres pays ont réalisé un «bond technologique et variétal», et sont comme la Syrie, la Turquie et le Kazakhstan en train d'émerger comme acteurs significatifs sur le segment du blé dur. Il s'agit de semer les bons «itinéraires techniques» chez des producteurs qui jusque-là n'avaient pas de retour de l'information sur la qualité de leur produit. La prime à la qualité n'est pas incitative en Algérie sous le régime rigide des prix actuel. Le groupe Benamor, détenteur de moulins et principal artisan du projet de «promotion de la qualité des blés durs dans les hautes plaines de l'Est», veut s'appuyer sur une première expérience réussie de «valorisation de la filière » ; qui montre que lorsque «les industriels se penchent sur leur environnement, notamment sur ce qui se fait sur leur amont, ils peuvent ensemble avec les producteurs améliorer toute la chaîne de valeur au profit de tous». Cette expérience réussie est celle de la tomate industrielle. La tomate de 15 à 60 tonnes à l'hectare Le président de la filière de la tomate en Algérie, Messaoud Chebbah, est aussi un peu son gourou. Ce tonitruant quinquagénaire ingénieur agronome, implanté dans la plaine du Seybouse, à Annaba, a été repéré en 2003 par les conserveries Benamor (CAB), de Guelma. Il produit plus de 80 tonnes à l'hectare d'une tomate de bonne qualité sur ces parcelles. La moyenne dans la région tourne autour de 15 tonnes l'hectare. En Tunisie, elle est plus proche des 90 tonnes l'hectare. Consultant pour CAB, Messaoud Chebbah audite la production de tomate de la région (Skikda,Annaba, Tarf) et découvre «une discordance entre les choix végétaux, les types d'irrigation et les options de fertilisation : rien ne marche avec l'autre». La filière d'excellence CAB se met alors en place. Des stations d'expérimentation pour dégager les bonnes combinaisons en fonction des sols, des plants et des cycles permettent de convaincre les producteurs d'adopter les bons itinéraires techniques. Ils sont dix à le faire à titre de démonstration à l'an 1 du plan tomate. Trois cents la seconde année. Les rendements ont décollé entretemps. A la troisième année, le rendement moyen chez les producteurs qui travaillent pour la CAB est de 60 tonnes à l'hectare. La production explose. Les conserveries multiplient par cinq leur capacité de transformation. Le groupe Benamor est récompensé de son effort d'organisation de la filière: sa filiale conserverie détient en 2009 environ 50% d'un marché national de 40 000 tonnes de tomates. Un premier marché extérieur s'ouvre à la même période. Le cycle vertueux est entamé. «Mais il reste beaucoup à faire, précise Messaoud Chebbah, nous consommons deux fois plus d'eau pour kilo de tomate ailleurs, nous n'avons pas encore, et c'est tout à fait anormal, développé une variété végétale algérienne dans la tomate». Le progrès de la filière tomate est tout de même spectaculaire. Il a permis de convaincre à leurs tours les pouvoirs publics. Le ministre de l'Agriculture Rachid Benaïssa est annoncé à Annaba pour l'ouverture des journées techniques «blé dur». Producteurs et transformateurs ont plus de chance de marcher dans le même ordre, plus vite. |
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