Comment
expliquer la diminution du commerce mondial des armes dans les périodes entre
2012-2016 et 2017-2021 ? Même si les nouvelles données sur les transferts
internationaux d'armes, publiées le 14 mars dernier par le Stockholm
International Peace Research
Institute (SIPRI), confirment une tendance à la baisse de 4,6% durant la
période en question en matière des transferts internationaux d'armes, les
chiffres restent quand même assez troublants. Contrairement à ce qu'on pourrait
croire, cette baisse n'est pas due à une époque de paix que traverse le monde.
Car, à voir de plus près, on constate que « la faible diminution des transferts
d'armes dans le monde masque de grandes variations entre les tendances
régionales», comme le précise Pieter D. Wezeman,
chercheur principal au programme Transferts d'armes du SIPRI. Si entre 2012-16
et 2017-21, trois régions du monde connaissent une baisse globale des
importations d'armes, les Amériques (-36%), l'Afrique (-34%) et l'Asie-Océanie
(-4,7%), d'autres régions ont connu une forte et inattendue hausse des
importations d'armes. A commencer par l'Europe, qui connaît la plus forte
augmentation des importations d'armes. Selon les données du SIPRI, «en 2017-21,
les importations d'armes majeures par les États européens étaient supérieures
de 19% à celles de 2012-16 et représentaient 13% des transferts mondiaux
d'armes. Les plus grands importateurs d'armes en Europe sont le Royaume-Uni, la
Norvège et les Pays-Bas». Notant que «d'autres États européens devraient
également augmenter considérablement leurs importations d'armes au cours de la
prochaine décennie, ayant récemment passé d'importantes commandes d'armes
majeures, en particulier d'avions de combat en provenance des États-Unis». Y a-t-il quelque chose qui ne tourne pas rond sur ce
continent ? D'habitude, pour l'Europe, l'importation des armes est une affaire
qui ne les concerne pas. Pour en exporter, oui, mais pour importer des armes,
le besoin ne se faisait pas sentir depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.
Que se passe-t-il alors ? « La grave détérioration des relations entre la
plupart des États européens et la Russie a joué un rôle important dans
l'augmentation des importations européennes d'armes», explique un chercheur du
SIPRI. Les armes vont là où les guerres éclatent ou sont sur le point de
l'être, et l'Europe est devenue ces derniers temps une zone de tension qui
rappelle un peu les deux précédentes guerres mondiales, qui ont toutes deux
commencé en Europe. Est-ce à dire que la baisse des importations d'armes dans
d'autres régions, en Afrique par exemple (à l'exception de l'Egypte, propulsée
troisième plus grand importateur d'armes au monde), est due à une baisse de la
tension sécuritaire ? Le Moyen-Orient reste, dans le passé, le présent et
l'avenir (selon les livraisons d'armes prévues dans les prochaines années) une
région où les importations d'armes sont toujours très importantes. Alors que
l'industrie militaire des Etats-Unis et de la France tourne à plein régime, il
est aisé de comprendre que leurs exportations d'armes augmentent parallèlement
à une production accrue. Le commerce de la mort a peut-être diminué par-ci,
mais il a trouvé de nouveaux terrains fertiles par-là.