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La Tunisie
n'a jamais été aussi proche d'un cyclone aussi énorme que celui qui la menace
aujourd'hui. Les espoirs entrevus à travers le passage d'un printemps
révolutionnaire furtif n'ont été qu'un mirage évanescent à telle enseigne
qu'une partie de la population tunisienne se surprend aujourd'hui à regretter
l'ère de Zine El Abidine
Ben Ali. La centaine de victimes mortes hier au nom d'une imprécise démocratie
n'aura laissé finalement derrière elle que la gravure d'une réclamation simple
de moyens pour obtenir du pain. Le marchand ambulant qui s'était immolé par le
feu, et érigé depuis en héros, n'a jamais exigé la liberté de parler et était
loin de vouloir s'embarquer dans des réflexions philosophiques politiciennes,
mais par son geste désespéré, il ne réclamait que la liberté de gagner son
pain. Ce dont il était certain est que le sens que l'on accordait à la
démocratie était trop vague pour calmer sa misère et le temps lui a donné
raison. Sa fin tragique n'a laissé derrière elle qu'une ribambelle de
baroudeurs du verbe, emportés par les paraboles des lexiques trop légers pour
satisfaire les attentes des peuples.
On connaît de mieux en mieux le côté jardin et le côté cour des démocraties et les sociétés humaines ont fini par appréhender leurs autres retombées néfastes sur leurs existences. Ainsi et de fait, les remous sociaux et politiques auxquels fait face la Tunisie actuellement tout en résumant en surface des revendications pour une légitime conformité existentielle ne peuvent être détachés de la situation d'une sous-région mondiale en pleine ébullition. Les politiciens tunisiens en herbe qui rasaient les murs hier et qui brandissent les slogans des démocraties n'ayant pas prouvé partout dans le monde leur efficacité feignent d'ignorer qu'ils creusent aussi un tombeau pour le peuple tunisien. Ils se prêtent en même temps à une stratégie fomentée ailleurs pour que la Tunisie soit isolée et soit contrainte d'adhérer à un rang planifié et tracé pour que le Maghreb change de forme et de visage. |
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