|
Envoyer à un ami |
Version à imprimer |
Version en PDF
Qui aurait
pensé, il y a quelque temps encore, que chacun des Etats européens, scellés par
une union rigide, se recroqueville sur lui-même et institue un visa d'un genre
particulier pour n'importe quel ressortissant du vieux continent ? Qui aurait
cru, il y a un an à peine, que l'Espagne fermerait ses portes à tout voyageur
français qui frapperait à sa porte? A la faveur des
immenses déconvenues imposées par la pandémie du coronavirus, l'espace Schengen
semble perdre sa consistance et ne plus répondre à l'esprit qui l'a fait
naître. Le dieu virus a imposé ses lois pour que l'étendard aux vingt-sept
étoiles ne soit plus qu'une effigie aléatoire que les nombreuses conséquences
économiques et politiques néfastes ne lui permettent d'être livré qu'aux
humeurs des vents.
Le passeport sanitaire a pris la place du fameux visa. Il n'est pas dit que c'est là une œuvre d'un virus. Le corona n'a fait que dénuder l'espèce humaine pour qu'elle revienne à ses ancestraux repères, faute d'avoir trouvé le vrai itinéraire du grand bonheur. Déroutants, les temps ont changé. La nature, souvent imprévisible et rarement domptable, est encore venue calmer et redimensionner, à sa juste mesure, la nature humaine. Véritables séquestrations, les confinements en Europe ne s'arrêtent plus seulement à l'interdiction du mouvement de la population. Elles font perdre à la notion des nationalismes ses couleurs et de plus en plus nombreux sont ceux décidés à prendre le large pour prendre de l'air. Comme il est question d'une insoutenable mal-vie, la tendance est au retour aux origines de l'homme, toujours en quête de nouveaux espaces de chasse quand il a faim. Le Moyen-Orient, l'Asie et l'Amérique ont des cieux de prédilection pour se refaire une nouvelle vie et une pléthore de ressortissants européens s'y installent pour replanter leurs gènes non sans détermination pour donner une gifle aux frontières et à leurs embrigadements. Tous n'ont de nations que celles des terres qui les nourriront. Il est indéniable que le mouvement migratoire du sud vers le nord va inverser le cours du sens. Témoins, l'échappée vers les cieux ensoleillés s'accentue et des harraga africains, par centaines, déçus et désopilés, se surprennent pris à la gorge pour décider de revenir au bercail. Le paradoxe est permanent. Le monde est infini et réduit en même temps. Sa surface est tantôt large ou tantôt limitée, selon la disponibilité du pain. |
|