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Pauvre
Benjamin Stora ! Voilà donc « le plus Algérien des
historiens français » qui se retrouve brutalement l'objet d'attaques et de critiques
auxquelles il ne s'attendait guère, lui qui a toujours voulu être un pont de
rencontre et d'intelligence entre l'Algérie et la France, entre le passé et le
futur, entre ce qui était (et est) de sain dans les deux sociétés. A la demande
(commande ?) du président français, E. Macron, et avec l'accord du président
algérien, A. Tebboune, il a élaboré un rapport « sur
les questions mémorielles portant sur la colonisation et la guerre d'Algérie ».
Côté algérien, A. Chikhi devait en faire de même. Son
rapport donc, médiatisé, s'est retrouvé sous les feux de la rampe médiatique.
Une conséquence tout à fait normale côté français, mais l'était-elle côté
algérien ? Une anormalité normale, tant il est vrai que les Algériens sont
restés assez sensibles à tout ce qui se dit ou s'écrit sur eux
outre-Méditerranée, tout particulièrement par leurs anciens « occupants »
(Ainsi d'ailleurs, étonnant, n'est-ce pas ? qu'aux contentieux «
franco-français » relatifs à la « guerre d'Algérie»). On se
débarrasse très difficilement, sinon « impossible-ment » des « boulets » de
l'Histoire qui, bien longtemps , parfois plusieurs siècles après, bien
qu'enfouis dans les subconscients collectifs , ne manquent pas de ressurgir,
encore plus, dans une société où l'oralité, avec ses histoires vraies ou
détournées, est une arme fatale, encore plus dans une société où l'Histoire
écrite reste encore à (par-) faire, encore plus lorsque le champ de l'écriture
de l'Histoire est envahie par toutes sortes d'énergumènes (péri-, para- et
pseudo -historiens), laissant les historiens vrais ? ceux qui ont cherché,
écumé les archives et les bibliothèques, fouillé méthodiquement les mémoires,
enseigné, écrit, publié - dans les vestiaires ou les caves de la communication.
Une anormalité normale dans un pays où nous n'avons pas encore une idée précise sur ce que nous voulons produire exactement comme réponse (puisque l'Algérie est en retard de « rapport ») ou comme demandes (exigences ?) officielles à l'Etat étranger qui a envahi, sans raison valable, sinon celle de « dominer mieux ou pire et plus que les autres », notre pays , l'a occupé durant plus d'un siècle et demi, l'a exploité, quasi-exterminé, dépossédé, sous-humanisé, martyrisé. En fait, on a mille et une demandes ! Il est vrai que la colonisation a causé -ici et en France même, aux Algériens et à des Français eux-mêmes, tout particulièrement aux sympathisants de la cause ainsi qu'à pas mal d'« Algériens » d'origine européenne entraînés contre leur gré dans des conflits qu'ils ne souhaitaient peut-être pas - mille et un dégâts dont plusieurs irréparables et impardonnables. Cela va des excuses aux réparations financières, en passant par la reconnaissance des crimes commis. Il y a, aussi, certains qui ne veulent ni réparations, ni excuses, ni reconnaissances, le verdict de l'Histoire étant déjà prononcé par la victoire par les armes (et la diplomatie, bien-sûr) et une indépendance arrachée (et non octroyée) à célébrer avec éclat chaque année que Dieu fait. Donc, aujourd'hui, côté ancien occupant, tout du moins durant la mandature Macron, en tout cas ce qui lui en reste pour l'actuelle, on sait exactement ce que la France officielle actuelle veut. Ne pas trop se faire d'illusions quand on sait combien l'histoire du passé colonial avec l'Algérie (et avec d'autres pays) est étroitement lié à la vie politique franco-française. Depuis la fin de la guerre, quelques percées mais un parcours « en zig-zag »! Aujourd'hui, le rapport Stora, a le mérite d'exister. Ainsi, d'ailleurs, que les observations de Apathie, Manceron, Blanchard, Le Cour Grandmaison? Pour mieux en discuter, le déconstruire ou l'améliorer, le rejeter ou l'accepter. On attend le nôtre. L'essentiel et le plus important. Pour la première fois, chez nous, un document officiel. Un grand pas ! |
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