La libération des quatre otages au Mali contre la
libération de quelque 200 djihadistes a encore rompu le dogme, déjà très mal
respecté, par les Etats occidentaux notamment, où la forte influence des sociétés,
qui se solidarisent avec les otages et leurs proches, contraint les dirigeants
de ces pays à nouer des tractations avec les groupes terroristes pour payer des
rançons, ou autre monnaie d'échange, contre la libération de leurs
ressortissants enlevés. De nombreux pays ont exprimé leur désapprobation face à
cette libération négociée de quatre otages, « payée chèrement », selon le
président du Burkina Faso, Roch Marc Christian Kaboré.
Cette libération de 200 djihadistes, parmi lesquels figurent de dangereux
terroristes, ne peut qu'ajouter à l'inquiétude d'un pays qui a subi, pas plus
tard que mercredi 14 octobre, une série d'attaques djihadistes qui ont fait une
vingtaine de morts, selon les déclarations du président burkinabé. La France, l'Italie et le Mali ne peuvent que se féliciter de la
libération des quatre otages, une Française, deux Italiens et une haute
personnalité malienne, personne ne peut d'ailleurs ressentir autre chose que de
la satisfaction après la libération des otages, mais les négociations avec les
kidnappeurs, le prix à payer et les retombées attendues en matière de lutte
antiterroriste dans cette région, poussent plus à la crainte de voir les
groupes terroristes renforcer leur capacité de nuisance, sans oublier que cette
victoire les encouragera à sévir encore en multipliant ces rapts qui se
confirment forts bénéfiques, non seulement pour le moral des troupes, mais
également pour la trésorerie et l'armement, grâce au soutien de la récolte des
rançons et la libération des leurs. Ainsi, ce dernier coup, éclatant
pour la nébuleuse terroriste en activité au Sahel, augmente les soucis
sécuritaires à travers le risque accru d'attentats terroristes au Mali et les
pays limitrophes, avec lesquels il partage 7.420 km de frontières,
particulièrement l'Algérie (au Nord), le Niger et le Burkina Faso (à l'Est) et
la Côte d'Ivoire (au Sud). L'Algérie, qui a plaidé avec
acharnement à l'ONU, dès le début des années 2000, pour la criminalisation du
paiement des rançons aux groupes terroristes contre la libération d'otages,
ayant abouti en 2014 à la prise de la résolution 2133, qui interdit « de mettre
des fonds, avoirs financiers ou ressources économiques ou autres services
connexes directement ou indirectement à la disposition de personnes qui
commettent ou tentent de commettre des actes de terrorisme et d'empêcher les
terroristes de profiter directement ou indirectement de rançons ou de
concessions politiques », garde un silence pesant sur ces tractations qui ont
abouti à la libération de quatre otages contre l'élargissement de 200
djihadistes, parmi lesquels figurent de simples suspects arrêtés lors
d'opérations de ratissage et également des responsables de certains des
attentats les plus meurtriers de ces dernières années dans la région, selon des
sources bien informées à ce sujet, notamment des militaires français déployés
au Mali dans le cadre de l'opération ?Barkhane', qui se sont exprimés sous
l'anonymat. Même si on attribue les tractations en
question au Mali, qui a négocié seul avec le camp des preneurs d'otages, la
France qui ne s'est pas moins sentie impliquée dans cette situation, vu son
importante influence au Mali et la nationalité française de l'un des otages, a
vite réaffirmé sa volonté de ne pas dévier du cadre de la lutte antiterroriste
pour réconforter ses militaires au Mali, dont le moral a subi un sérieux
contrecoup, ainsi que les familles qui ont perdu l'un des leurs dans les
combats dans ce pays, et rassurer Alger en y dépêchant son ministre des
Affaires étrangères immédiatement dans le sillage de ces évènements.