L'état-major
de l'ANP persiste et signe dans son refus de toute période de transition à
laquelle appellent l'opposition et la rue. Dans son éditorial du mois de mai,
la revue El Djeich, organe officiel de l'armée,
dénonce ceux qui rejettent «toutes les solutions disponibles et possibles» qui
permettront à l'Algérie de surmonter la crise politique qui la secoue. La même
source qualifie d'«aventuristes» les tenants de cette option, les accusant de
concocter des plans et projeter de les exécuter «à tous les échelons, dans le
but d'entraîner le pays vers l'anarchie et le chaos». L'armée évoque ni plus ni
moins un complot qui remonte, selon elle, à plusieurs années et qui comprend
plusieurs niveaux de responsabilité allant des exécutants aux commanditaires en
passant par leurs alliés. Et pour l'éditorial d'El Djeich,
ces personnes sont connues et ce sont les mêmes «qui avaient sollicité
l'intervention de l'armée dans le champ politique durant les précédentes
décennies». L'état-major rejette, donc, catégoriquement une période de
transition réclamée par le truchement de voies multiples dont la plus courante,
détaille la revue, est de faire pression, à travers des «messages ouverts»,
«débats», «avis» et «points de vue» publiés dans les colonnes de certains médias.
L'armée identifie ainsi et clairement ses adversaires, les partisans d'une
transition en dehors des 3B (Bensalah, Bedoui et Bouchareb) qu'elle
associe à des complices du complot visant à conduire le pays vers le chaos. A
travers ces graves accusations, Gaïd Salah semble
restreindre drastiquement le champ politique et le débat contradictoire,
excluant de facto toute autre solution que celle de la présidentielle du 4
juillet prochain.
Même s'il
est plus que probable que le président de l'APN va être sacrifié, la feuille de
route imposée par le pouvoir est refusée par les partis de l'opposition et la
rue qui exigent la chute du régime en place. Devant ces positions tranchées, il
est fort à craindre une confrontation frontale entre les deux camps retranchés
et un changement dans les attitudes des uns et des autres. On peut aussi
appréhender une restriction des libertés individuelles et des tentatives de
musellement de la parole contradictoire, comme cela a été le cas avec Me Bouchachi, interdit de conférence à Blida et à Oran. Ce qui
est certain par contre, c'est que le mouvement populaire ne donne aucun signe
d'essoufflement, comme craint ou attendu, à cause du Ramadhan, et les marches
des étudiants, mardi dernier, consacrent toute la détermination du Hirak d'aller au bout de ses revendications.