
Un peuple debout est un peuple qui n'avance pas, dit le titre
de la chronique. Donc, logiquement, s'il n'avance pas, c'est qu'il est
statique, dans le meilleur des cas, sinon il recule, clame le proverbe bédouin.
Admettons. Le peuple algérien, peuple debout par excellence, selon les
historiens locaux, avance-t-il ? Ne bouge pas ? Ou alors recule en faisant
attention à la marche arrière ? Trois points d'interrogation qui viennent
mourir dans le cimetière des éternelles questions posées à l'histoire de
l'Algérie et restées, depuis, sans réponse. Qui a tué Abane Ramdane ? Qui a
trahi Amirouche ? Qui est réellement l'Emir Abdelkader ? Où est passé le butin
de guerre du FLN ? Qui a tiré de derrière le rideau ? Nos ministres ont-ils
leur bac ? Qui manipule qui et pourquoi n'a-t-on pas encore inquiété les
buveurs de pots-de-vin au lieu de s'en prendre aux buveurs de vin ? Voilà un
peu le résumé non exhaustif des interrogations qui nous narguent depuis les
balcons de la République. Le peuple algérien ignore tout des réponses, même
s'il subodore la trahison des uns, toujours les mêmes, eux et leur descendance
sur livret de famille et leurs maîtresses et la famille de leurs lits
illégitimes. Le peuple algérien devant ce constat s'est arrêté de marcher, lui
qu'on a toujours fait marcher, mettant le frein à main devant l'immeuble de la
République. Il est toujours debout, faute de places assises et attend que le
propriétaire des lieux daigne bien descendre les recevoir. Faut-il alors
accabler le peuple algérien de ne pas bouger, de ne même pas pouvoir faire
marche arrière et changer le cours de l'histoire en cachant l'éventail au dey
d'Alger ? Le peuple algérien est statique, sa partie la plus jeune court en
brûlant les pneus et en nageant à contresens de la Méditerranée. Sa partie la
plus féminine se bat contre les interdits sociaux et son incapacité à
s'assumer. Sa partie la plus âgée continue à croire que Boumediène est encore
en vie. Qu'attendre alors d'un peuple brimé, assisté, qui passe son temps à
regarder son ventre et à penser à plus bas que son ventre ? Rien sinon d'être
fataliste, de ruminer en regardant toujours sous les balcons espérant, un jour,
qu'ils s'affaissent sous le poids des pots de? vin.